Les influences

George Lucas : les racines Américaines

Frank Marshall (producteur) : « Au début 1979, George a demandé à Jim Steranko, qui est notamment le directeur de la revue de cinéma Mediascène, de faire trois dessins d'Indiana Jones. Il voulait que Steranko lui trouve un style : un blouson en cuir, un chapeau à la Humphrey Bogart, un fouet et une sorte de regard d'idole de série B. Un des dessins de Steranko était exactement ce que voulait George Lucas, les autres montraient la bataille avec l'aile volante, le face-à-face avec le serpent et enfin Indy sautant d'un cheval sur un camion. Tous ces dessins sont devenus des scènes-clès pour le film. Ils ont été faits un an et demi avant le tournage […] L'Écran Fantastique N°22

[…] Quand j'ai apporté le script à George, il aménageait son bureau chez Industrial Light and Magic. Je l'aidais à fixer toutes ces grandes photos au mur, l'une d'elles montrait un type qui sautait d'un cheval sur un camion. Ça provenait d'un feuilleton et il m'a dit que Raiders c'était tout ça. Mais le film ne traite pas de ce feuilleton précis, ça concerne cette image qui est la clé de tout le film. » L'Écran Fantastique N°22

Les feuilletons qui inspirèrent George Lucas sont essentiellement, The Perils of Nyoka, connu aussi sous le titre Nyoka and the Tigermen (William Witney, 1942) et The Masked Marvel (Spencer Bennet, 1943).

Les serials

The Perils of Nyoka/Nyoka and the Tigermen
(William Witney, 1942)

The Perils of Nyoka met en scène un archéologue, le Professeur Campbell (Forbes Murray), et son assistant, le Docteur Larry Grayson (Clayton Moore). Les deux savants découvrent un ancien papyrus indiquant l'emplacement des Tablettes d'or d'Hypocrate. Ce fabuleux trèsor perdu dans l'antiquité contiendrait les secrets de la médecine Grecque. Les deux compère montent une expédition dans le désert d'Arabie à la recherche de la belle Nyoka Gordon (kay Aldridge), seule capable de traduire les fameuses Tablettes. Après quelques péripéties, ils sont tous capturés par la méchante Vultura (Lorna Gray), mais ils parviennent à s'échapper pour retrouver les tablettes.

The Masked Marvel
(Spencer Bennet, 1943)

Synopsis : En Chine, pendant la guerre, la prise de conscience d'un mercenaire. Le héros de China est un certain Mr Jones (Alan Ladd). Il a déjà le costume de l'aventurier, Fedora, chemise kaki et veste en cuir…

Il existe bien d'autres feuilletons qui furent une source d'inspiration, Spy Smasher (que l'on peut traduire par Le fracasseur d'espions !), dont le héros Alan Armstrong (Kane Richmond) lutte contre les Nazis. Au cours de ses aventures, on croise, des ailes volantes et une base de sous-marins… (il s'agit à l'origine d'un super-héros de bande dessinée). Il y a aussi BlackHawk, Don Winslow of the Navy, et bien d'autres…

Les films

China (Le Défilé de la mort)
(John Farrow, 1943)

Synopsis : En Chine, pendant la guerre, la prise de conscience d'un mercenaire. Le héros de China est un certain Mr Jones (Alan Ladd). Il a déjà le costume de l'aventurier, Fedora, chemise kaki et veste en cuir…

The Treasure of the Sierra Madre
Le Trésor de la Sierra Madre)
(John Huston, 1948)

Synopsis : Dobbs et Curtis travaillent sur un chantier dont le chef part avec le salaire des ouvriers. Ils partent à sa recherche et récupèrent leur argent. Puis ils s'associent avec le vieil Howard pour exploiter un filon d'or dans la Sierra Madre.

Pour construire son héros, George Lucas s'est souvenu du chef-d'œuvre de John Huston The Treasure of the Sierra Madre (Le Trésor de la Sierra Madre), et de Fred C. Dobbs, son aventurier crapuleux incarné par Humphrey Bogart.

The Secret of the Incas (Le secret des Incas)
(Jerry Hopper, 1954)

Il a du aussi visionner attentivement The Secret of the Incas, où Harry Steele (Charlton Heston) possède déjà presque toute la panoplie du petit Indy. On y retrouve, la barbe de trois jours, la veste en cuir ainsi que le Fedora… Il est aussi question d'une quête archéologique. On y retrouve beaucoup d'éléments utilisés par la suite dans la saga Indiana Jones. Des scènes de jungle, de torrents, et une scène très proche de celle de la salle de la maquette, où Indy utilise le Bourdon de Râ et la lumière du soleil pour trouver l'emplacement du Puits des Âmes.

Voir aussi l'interview de Deborah Nadoolman

James Bond

George Lucas eut aussi l'idée d'une séquence d'ouverture directement inspirée des James Bond. Ce prologue musclé plongeait directement le spectateur sans aucune connaissance du personnage ou du contexte au cœur d'une action ahurissante. Cette ouverture tonitruante servait de tremplin pour la séquence suivante, une très longue scène de dialogue entre Indy et les agents secrets à l'Université (La scène dite du "bâton"). Cette astuce est utilisée sur tous les James Bond depuis 1963.

Le saviez-vous ?

La scène dite du « bâton » : Tous les films ont une telle scène. George Lucas l'appelle la scène « bâton » en référence à la scène classique d'Indiana Jones Les Aventuriers de l'Arche Perdue, où celui-ci fait un croquis explicatif du fonctionnement du médaillon de Râ emboîté sur le fameux bâton.

C'est une scène paisible, sans musique, très longue, environ 5 à 10 minutes, où sont exposés des faits. Presque tout ce que disent les personnages est essentiel à la bonne comprention de la suite de l'histoire.

George Lucas : « Hélas, c'est une scène qu'il faut toujours avoir dans un film, il faut la placer quelque part. Personne ne veut la faire. C'est difficile à tourner et l'on a peur d'assommer le public, mais c'est essentiel pour raconter l'histoire. Comme par magie, elle finit toujours par se situer vers le tiers du film au bout de 30 ou 40 minutes. »

D'après le commentaire audio de George Lucas pour le DVD Star Wars Épisode I.

Steven Spielberg : les racines Européennes

Indy a plusieurs pères, Steven Spielberg est l'un d'eux. On connaît son admiration pour le réalisateur britannique David Lean ainsi que sa passion pour Lawrence of Arabia (Laurence d'Arabie), 1962. Il porte le même intérêt à Orson Wells (réalisateur et acteur américain exilé en Europe), et particulièrement à son chef-d'œuvre Citizen Kane, 1940. On connaît aussi sa passion pour le cinéma de François Truffaut (réalisateur et acteur français), il l'engagera d'ailleurs comme acteur dans Close Encounters of the Third Kind (Rencontre du Troisième Type). Il est évident qu'il possède une autre culture, "plus Européenne", très différente de celle de George Lucas.

Steven Spielberg : « Les serials ont sans doute été plus importants pour George Lucas que pour moi. J'aimais les serials, j'en ai vu énormément au cinéma de Phœnix, Arizona, où j'ai passé ma jeunesse. Mais ils ne sont pas restés gravés dans ma mémoire comme dans celle de George. Le fan, c'est lui. » STARFIX N°18

Lawrence Kasdan (scénariste) : « Je n'ai vu aucun serial durant l'écriture de mon script et j'en ai vu trois tout au plus dans toute ma vie. Ce que j'aime, ce sont les bons films d'aventure, cela a créé une confusion dans l'esprit des gens, car on se demande d'où vient le style Raiders. Je pense que George aime les serials, mais ce que Steven a apporté à Raiders le rend différent : ce film n'a rien à voir avec la façon dont les serials étaient tournés, joués, écrits. Ce fut beaucoup plus proche de grands films d'aventure, comme ceux de Burt Lancaster, Clark Gable, Errol Flynn ou encore The Great Escape (La Grande Évasion)… »

TINTIN

Spielberg s'inspire indirectement de Tintin par l'intermédiaire cinématographique de L'homme de Rio, qui serait une libre adaptation de l'album : L'Oreille Cassée (The Broken Ear).

Parue en 1937, cette aventure est une course-poursuite palpitante. Tintin s'embarque pour l'Amérique du Sud afin de récupérer un fétiche volé. Là-bas s'opposent toutes sortes d'intérêts : militaires, économiques, la guerre du Gran Chaco venait d'opposer, trois ans durant, la Bolivie et le Paraguay.

Une statuette Arumbaya est volée… puis restituée à son musée. Mais un détail révèle à Tintin que ce n'est pas l'original qui a été rendu, mais une simple réplique. Quel mystère cache donc cette statuette pour que l'on veuille en maquiller le vol ? Tintin s'embarque pour l'Amérique du Sud où, croit-il, se trouve la clef de cette énigme.

Le saviez-vous ?

C'est en lisant les comptes-rendus de la presse européenne que le réalisateur américain apprend que l'on compare son film à une série de BD franco-belge créée par un certain Hergé. Il n'y prête pas plus d'attention que cela. Quelques mois plus tard, la scénariste Melissa Mathison offre à Spielberg son premier Tintin, Le Crabe aux pinces d'or.

Steven Spielberg : « Cela fait plus d'une vingtaine d'années que j'ai ce projet à l'esprit. J'ai connu l'existence de Tintin grâce à une critique des Aventuriers de l'Arche Perdue où un journaliste comparait le personnage d'Indiana Jones à Tintin. Ni George ni moi ne savions qui il était. Je me suis donc renseigné sur ce personnage, j'ai lu la collection. Je suis entré en contact avec Hergé en 1983, nous devions nous voir, mais il est mort subitement quelques jours avant notre rencontre. C'était il y a plus de vingt ans… ». Ciné Live n°123

À l'époque, la compagne d'Harrison Ford, avait fait quelques baby-sitting dans une famille française pour se payer ses études. C'est au contact de cette famille qu'elle découvre les albums d'Hergé, totalement inconnus aux États-Unis.

Elle fait parvenir à Spielberg un album en français du Crabe aux pinces d'or. En regardant les dessins, il se sent très proche de l'univers d'Hergé.

En novembre 1982, le siège des éditions Casterman reçoit un appel des États-Unis. Kathleen Kennedy, cofondatrice de la société Amblin Entertainment (qui produit les films de Steven Spielberg) aimerait savoir si les droits d'adaptation de Tintin pour le cinéma sont libres. La nouvelle est aussitôt transmise à Hergé qui en est très heureux.

Un rendez-vous est fixé en janvier 1983 à Los Angeles. Hergé, très affaibli par sa maladie, ne peut s'y rendre. C'est son fidèle secrétaire Alain Baran qui prend l'avion.

Spielberg envisage de réaliser une trilogie sur Tintin, qu'il considère comme un « Indiana Jones for kids ». Il espère confier le rôle de Tintin au jeune Henry Thomas, qui joue Eliott dans E.T. Quant au capitaine Haddock, il serait interprété par Jack Nicholson. Milou pose pour lui problème. Doit-il le laisser parler ou non ?

Spielberg pense réaliser le premier film. Si le succès est au rendez-vous, François Truffaut et Roman Polanski se frotteraient alors aux deux épisodes suivants.

Les avocats de la société Amblin ont spécifié que Spielberg réclamait le droit de  « pouvoir adapter en toute liberté » les aventures de Tintin sur grand écran. Hergé comprend cette revendication. Il a vu à la télévision -et apprécié- Duel qu'il a trouvé très « hitchcockien ». Il sent que Spielberg est un authentique créateur et compte bien lui laisser les coudées franches. Cette confiance, il ne l'a jusque là jamais donnée à aucun réalisateur.

Steven Spielberg annonce sa venue prochaine en Belgique pour rencontrer Hergé, malheureusement, le 3 mars 1983 Hergé meurt. Apprenant la nouvelle par Telex, Steven Spielberg et Kathleen Kennedy envoient sur le champ « un message de condoléances et réaffirment plus que jamais leur envie de mener à terme la réalisation d'un film sur Tintin ».

Steven Spielberg rencontre la veuve de Hergé, Fanny Remi à la fin du mois de mars. Il demande même à visiter les Studios Hergé à Bruxelles.

Le décès d'Hergé a ralenti le processus d'adaptation des albums de Tintin par Steven Spielberg au cinéma. Le premier script signé Melissa Mathison ne sera prêt qu'en 1985. Il s'agissait d'une adaptation de Tintin au Congo. Il est soumis à Roman Polanski, mais ce dernier ne trouve pas grâce à ses yeux, il aurait préféré adapter Le Sceptre d'Ottokar. Le projet est au point mort…

Il faudra attendre 2002 pour que le projet refasse surface.

Steven Spielberg : « Je ne trouvais pas de scénario qui rende justice à Hergé… ».

En 2007, Steven Moffat, le scénariste de la série anglaise Doctor Who, adapte Le Secret de la Licorne. Quand Moffat dut repartir sur Doctor Who, Spielberg demanda à Edgar Wright et Joe Cornish de prendre la suite.

Steven Spielberg : « Peter Jackson et moi voulions des scénaristes anglais, ils ont grandi avec… ».

L'Homme de Rio

Steven Spielberg s'inspire donc de L'homme de Rio, film français réalisé en 1964 par Philippe de Broca, avec Jean-Paul Belmondo et Françoise Dorléac. Cette comédie d'aventures trépidantes multiplie les moyens de transport, les paysages et les défis pour son anti-héros. Un excellent divertissement devenu un classique du genre.

Spielberg revit le film une dizaine de fois en préparant son propre film. Il enverra à Philippe de Broca une lettre où il reconnaît humblement son dû.

Comme on a pu le voir, rien de neuf dans Indiana Jones, juste un recyclage assumé d'ingrédients éprouvés. Cette surenchère visuelle et sonore donnera "la recette" des blockbusters* à venir : Lethal Weapon (L'Arme Fatale), Beverly Hills Cop (Le Flic de Beverly Hills), Mission Impossible, Batman et bien d'autres…

*Blockbuster : Cet américanisme désigne les superproductions concoctées par les studios hollywoodiens et dont le but est ouvertement de rapporter le maximum d'argent.


Dernière mise à jour le 28/05/2012

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